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Le prix de l’Excellence : la face cachée de l’éducation à Singapour

C’est un article qui a fait le tour du monde : la méthode de Singapour, en ce qui concerne les mathématiques, est miraculeuse. Et permet des résultats incroyables*.

Or ce que beaucoup de gens ignorent, c’est que le système scolaire de Singapour est très compétitif. En Asie, l’éducation reste une valeur et la réussite à l’École est primordiale pour beaucoup de familles.

A l’instar ce qui se passe au Japon ou en Corée du Sud, les élèves sont mis sous pression, non seulement par le système scolaire, mais aussi (souvent) par leur entourage.

Singapour a un système qui produit des résultats excellents (dont les médias parlent beaucoup) mais a aussi une face moins connue (que les médias passent parfois sous silence).

 

Le poids du PSLE

4 lettres qui terrorisent les familles à Singapour. PSLE est l’acronyme de “Primary School Leaving Examination”. C’est un des examens les plus importants à Singapour et il se passe à l’âge de douze ans.

Le taux de réussite est supérieur à 97% mais l’enjeu est ailleurs. Le but est d’avoir la meilleure note possible. En fonction de votre résultat, vous avez accès aux meilleures écoles de l’île. Mais surtout votre scolarité est très influencée par votre score au PSLE.

Outre l’accès aux “bons” établissements, les deux-tiers des “meilleurs” élèves auront accès à l’express stream qui permet de faire le programme scolaire secondaire en 3 ans.

Les 20% suivants feront le même programme, mais en quatre ans. Anodin ? Demandez donc aux parents qui vont devoir payer 4 ans de scolarité au lieu de 3 années pour la plupart des familles.

Quant aux 10% restants, ils seront orientés vers le “Technical Course”. Le gouvernement a beau essayé de le présenter sous un jour différent, pour de nombreux parents à Singapour cela équivaut à une impasse.

 

L’obligation des cours privés

98% des élèves ont eu recours à des cours privés au moins une fois lors de leur scolarité. Le marché des cours particuliers et des “Tuition centers” représente 1.1 milliard de dollars par an dans la Cité-Etat.

De facto la plupart des élèves suivent des cours après les cours pour se préparer aux examens. L’éducation est un business qui se porte très bien dans la Cité-Etat.

Il suffit de se promener dans n’importe quel centre commercial de la ville pour voir ces fameux centres. Ceux-ci sont en plein expansion (plus de 850 dans l’île) et recrutent des professeurs à prix d’or, ce qui nous amène au point suivant.

 

La pénurie de professeurs des Ecoles

Pourquoi devenir professeur dans une Ecole si vous pouvez devenir professeur dans un tuition center. Ou mieux : prof particulier.

La plupart des futurs professeurs donnent déjà des cours particuliers pour financer leurs Etudes. Et ils voient donc déjà les avantages et inconvénients de ce type de travail en comparaison de celui de professeur dans un établissement public.

Moins d’élèves, souvent plus aisés, moins de cours à préparer, moins de parents à gérer… Mais surtout beaucoup plus d’argent (même si ce n’est pas non plus des salaires de banquiers) et d’exigence quant aux résultats.

Pourquoi une pénurie ? Car il est interdit pour un professeur du Ministry of Education (MOE) de donner plus de 6 heures de cours par semaine. Du coup de nombreux professeurs sautent le pas et deviennent professeur particulier ou dans un Tuition center à temps complet.

Ce qui n’est pas sans poser de nombreux problèmes. Une équation que le gouvernement n’a pour l’instant pas encore résolu.

 

Un taux de suicide inconnu à Singapour

21 Octobre 2016, un enfant de onze s’est suicidé en sautant de 17ème étage de son immeuble. La raison ? Ses résultats moyens à un examen.

Ce drame marque un tournant à Singapour. C’est une des premières fois où les médias de la ville parlent du suicide d’un élève. Le suicide est un sujet tabou à Singapour. Le suicide des enfants à cause de la pression scolaire l’est encore plus.

Il y a des statistiques sur tout à Singapour. Sauf sur les sujets délicats : suicides, pauvreté, … Ainsi il y a beaucoup de rumeurs mais en l’absence de stats il est difficile de tirer des enseignements.

Les mauvaises langues diront que c’est parce que les chiffres sont accablants pour le gouvernement. En l’absence de stats je préfère ne pas m’avancer sur le sujet. Cependant la situation n’apparaît pas aussi dramatique qu’en Corée du Sud ou au Japon.

 

Quel avenir pour l’Education à Singapour ?

Le système éducatif de Singapour est régulièrement cité en exemple pour les résultats qu’il produit. Et effectivement il permet de produire de très bons résultats et fait probablement partie des meilleurs au monde (Classement PISA & cie).

Cependant il n’est pas non plus parfait. La volonté de trier et regrouper les élèves selon leur niveau, dès la fin du primaire, est louable. Cela a des avantages, mais certains élèves peuvent se sentir à l’écart et toutes les familles n’ont pas les moyens de faire du soutien scolaire.

Le gouvernement de Singapour est conscient des faiblesses se son système et tente d’y remédier (non-publication des meilleurs scores du PSLE, révision des quotas pour les professeurs, mis en place de passerelles entre les formations,…).

Mais comme en France, le sujet est très complexe. Et le moindre changement donne lieu à des litanies de complaintes des parents. Sujet sensible ? Définitivement !

 

*Source : La méthode de Singapour est-elle le Graal pour apprendre les maths ?

NDLA : l’article concerne uniquement le système éducatif de Singapour. Il fait abstraction des différentes institutions internationales (dont le Lycée Français de Singapour).

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